Aujourd’hui, je prends le temps de vous écrire personnellement. Mon nom est Roxane et je suis la cofondatrice de J.A.C.K., le Centre de Réhabilitation pour Primates situé à Lubumbashi, dans le Sud de la RD Congo.
Il est de ces rencontres que l’on n’oublie pas. Des mots, des échanges, des regards, des gestes qui peuvent marquer votre vie ou du moins avoir un impacte sur celle-ci.
Je ne vous cache pas que le kidnapping m’a énormément affectée mentalement et physiquement et qu’il m’a laissé un gout amer quant à l’humain en me confirmant que celui-ci pouvait être le pire des créatures sans cœur, sans respect.
Raison pour laquelle je me tourne de plus en plus vers les animaux qui ont beaucoup de choses à nous apprendre et qui ont les valeurs que nous, pauvres et stupides humains, avons perdues.
Rasco fait partie de ces individus qui, malgré son très jeune âge, avait beaucoup de choses à donner, à partager.
Très jeune, il était venu sans doute en train de l’intérieur du pays où vit son espèce et il a été mis en vente dans les rues de Lubumbashi. Comme tant d’autres, Rasco était un sous-produit du trafic de la viande de brousse. Comme tant d’autres, il a vu sa mère se faire tuer et être mangée sous ses yeux…
Nous avons sauvé le bébé ascagne à nez blanc il y a quelques semaines de trafiquants. Le jeune animal était dans un état pitoyable.
Infesté de puces, de tics, de vers de Cayor, le petit primate avait des plaies purulentes sur les bras et les jambes. Il était vulnérable, en manque d’attention et d’affection. Il fuyait à chaque fois que je tentais de le câliner, de le réconforter. Les trafiquants l’avaient gardé dans des conditions lamentables et l’avaient très certainement battu, frappé… Il lui manquait l’oreille gauche.
Ce n’est que après quelques jours que Rasco s’est ouvert à moi. Il m’appelait même pour venir dans mes bras pour que je m’occupe de lui. Entretemps, il a développé une horrible maladie de la peau (gale) et la peau de ses mains, de ses jambes tombait chaque jour. Tout a été mis en oeuvre pour qu’il aille mieux au plus vite.
Malgré cela, Rasco donnait beaucoup d’intérêt et d’amour à son entourage. Il avait mal, certaines plaies le faisaient souffrir mais il avait la joie de vivre et m’apportait beaucoup ainsi qu’aux autres membres de la maison. Il était un rayon de soleil dans cette situation morose et traumatisante du kidnapping et je ne le remercierai jamais assez pour tout ce qu’il a ainsi donné.
Mais voilà, les belles histoires ont toujours une fin. Celle de Rasco est triste.
Alors qu’il allait mieux mentalement et qu’il était dans de bonnes mains il a décidé de s’en aller laissant un grand vide derrière lui. Sans doute m’a-t-il choisie pour que je l’accompagne en fin de vie. Il se savait peut-être condamné et savait qu’avec moi, il allait partir aimé et choyé. Je suis heureuse d’avoir pu lui donner ce dont il avait besoin et, même si son départ m’a laissé moultes questions en tête, je me réconforte en me disant qu’aujourd’hui, il a enfin l’amour qu’il attendait: celui de sa maman qui lui manquait énormément!
Au revoir, mon petit Rasco. Et merci pour tout ce que tu as pu nous/m’ offrir en ces quelques semaines. Je ne t’oublierai jamais!
J.A.C.K. - Jeunes Animaux Confisqués au Katanga 